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Lutte contre les médicaments qui tuent

 

Le trafic de médicaments falsifiés et de qualité inférieure (MFQI) prive les patients africains de médicaments de qualité abordables. En janvier 2020, six gouvernements africains se sont associés pour lutter contre cette activité criminelle qui menace la santé publique, la sécurité des pays et leur état de droit. Elle fragilise aussi l’économie de la santé.

 

 

Un enjeu de santé publique

Le trafic de médicaments falsifiés et de qualité inférieure (MFQI) constitue une menace grave pour les individus et les familles en les privant d’un accès à des médicaments de bonne qualité à un prix abordable.

 

Par sa situation géopolitique, démographique et économique,
le continent africain représente un marché lucratif pour les trafiquants de MFQI :

– 70 à 90% des médicaments consommés en Afrique subsaharienne sont importés (McKinsey, 2019).
– 42 % des cas de trafic signalés au système mondial de surveillance
de l’Organisation mondiale de la Santé proviennent d’Afrique subsaharienne (OMS, 2017).

Les conditions socio-économiques des populations africaines favorisent la vente et la consommation de MFQI et constituent l’un des moteurs de l’expansion de ce trafic. Par ailleurs, les pays africains souffrent d’un système de santé fragile marqué par un défaut d’accès aux soins de santé et aux médicaments essentiels pour de nombreuses populations. On estime que 122 350 décès d’enfants de moins de cinq ans chaque année, dans les 39 pays d’Afrique subsaharienne, seraient liés à l’utilisation d’antipaludéens de mauvaise qualité (The American Journal of tropical medicine and hygiene, 2015).

Légende : Deux femmes se tenant devant
une pharmacie de rue en Ouganda – iStock

Un enjeu lié à la sécurité, à l’état de droit et à l’économie de la santé

Ce marché illégal représenterait 200 milliards de dollars américains au niveau mondial. Il fragilise fortement les économies africaines, notamment par le biais du blanchiment des capitaux. Les études menées par divers organismes internationaux indiquent que ce trafic est lié au crime organisé. Des indices de plus en plus importants, rapportés notamment par les services des douanes de plusieurs pays, signalent un lien avec les réseaux terroristes que les études en cours doivent confirmer.

Face à ce fléau, plusieurs gouvernements africains se sont associés pour trouver les moyens de lutter ensemble contre cette menace multidimensionnelle.

Les effets de la corruption sur la chaîne d’approvisionnement pharmaceutique

L’observation des effets des agents corrupteurs sur la chaîne d’approvisionnement pharmaceutique permet de prendre conscience de la nécessité 1) d’entreprendre une action interministérielle au niveau des pouvoirs publics et 2) de mettre en œuvre des plans coordonnés entre les secteurs public et privé et les acteurs de la société civile pour lutter efficacement contre le trafic.

La genèse du projet

Le 10 mars 2017, à l’occasion d’une rencontre à Oyo sur le Fonds Bleu pour le Bassin du Congo, la Fondation Brazzaville a annoncé le lancement d’une initiative pour lutter contre les médicaments falsifiés. Le 28 mars 2018, en partenariat avec le Harvard Global Health Institute et la London School of Hygiene and Tropical Medicine, elle a rassemblé diverses parties prenantes afin d’explorer les priorités mondiales en matière de santé lors d’une conférence à Londres sur le thème « Les médicaments mensongers ».

Conférence « Les médicaments mensongers »

Enfin, du 12 au 14 juin 2019 à Marrakech, la Fondation a organisé une série de réunions pour préparer les futures actions de lutte contre le trafic de médicaments falsifiés et de qualité inférieure en Afrique.

Réunion de Marrakech

L’Initiative de Lomé, une vision politique

Lors d’un sommet international organisé à Lomé le 18 janvier 2020, les chefs d’États et les représentants du Congo (B), du Ghana, du Niger, de l’Ouganda, du Sénégal et du Togo se sont réunis pour élaborer une réponse commune au trafic des MFQI et ont signé une déclaration politique marquant le lancement de l’Initiative de Lomé (IDL) dans laquelle ils s’engagent à agir contre le trafic de MFQI en prenant la résolution de :
– Renforcer et harmoniser les législations permettant de lutter contre le trafic de MFQI.
– Signer et ratifier les accords internationaux, notamment la convention MEDICRIME du Conseil de l’Europe, la convention de Palerme contre la criminalité transnationale organisée de l’ONUDC, et le traité instituant l’Agence africaine du médicament (AMA).

Le samedi 18 janvier 2020, l’Initiative de Lomé, développée par la Fondation Brazzaville, a été formellement lancée à Lomé, Togo, par S.E. Faure Gnassingbé, Président du Togo ; S.E. Yoweri Museveni, Président de l’Ouganda ; S.E. Macky Sall, Président du Sénégal, ainsi que des représentants de S.E. le Président Denis Sassou N’Guesso, S.E. le Président Nana Akufo-Addo, et S.E. le Président Mahamadou Issoufou.

Le ministère de la Santé du Togo, coordinateur politique

Hôte du sommet de Lomé en janvier 2020, la République togolaise assure depuis lors la coordination politique de l’Initiative de Lomé en maintenant des relations de travail avec les États signataires et candidats.

 

La coordination de l’IDL appelle les actions suivantes :
– Rencontre et mise en réseau des ministres de la Santé des états signataires
– Rencontre et mise en réseau des directeurs de la Pharmacie
– Accompagnement pour la signature des traités et conventions
– Accompagnement pour l’élaboration des plans nationaux
– Participation au monitoring du pilote au Togo
– Plaidoyer et représentation aux niveaux sous régional, continental et international

 

Pour mener à bien ces actions, le ministère de la Santé du Togo est soutenu par la Fondation Brazzaville, coordinateur technique.

S.E. Faure Gnassingbé
Président de la République togolaise

Nous menons ici un combat pour la santé, le bien-être de tous, l’accès à des soins de qualité et à des tarifs abordables. Un combat qui témoigne de notre foi dans l’avenir, le futur de nos enfants, celui de l’Afrique.

Dr. Tedros Adhanom Ghebreyesus
Directeur général, Organisation mondiale de la Santé

Les produits médicaux falsifiés et de qualité inférieure étant un problème commun, nous devons travailler ensemble sur des solutions communes. Avec une réglementation et un engagement politique forts, nous pouvons garantir à tous nos frères et sœurs en Afrique l’accès aux médicaments qu’ils méritent.

La méthodologie des plans nationaux de lutte contre les MFQI

Les consultations menées par la Fondation Brazzaville en 2021 avec les pays signataires de l’IDL et les partenaires techniques et financiers existants et potentiels, ont permis de réaliser un accord de méthode sur l’élaboration et la mise en œuvre des plans nationaux de lutte contre les MFQI. Cet accord de méthode appelle :
1. Une action déterminée et interministérielle au niveau
des pouvoirs publics en vue de créer une politique transversale ;
2. Une action concertée et coordonnée des pouvoirs publics avec
le secteur privé et les acteurs du système de santé portée,
notamment, par les acteurs de la société civile (ONG
et congrégations).

Les domaines d’action des plans nationaux
1. Le renforcement de l’état de droit
2. Le renforcement de la sécurité des états
3. La mise en place d’une politique d’économie de la santé
4. L’amélioration de la santé publique


Les cibles prioritaires des plans
1. Les femmes qui sont à la fois acheteuses et vendeuses de MFQI
2. Les jeunes qui ont la capacité de changer les comportements
d’achat
3. L’opinion publique
4. Les trafiquants

Rôle de la Fondation

La Fondation a organisé le Sommet de Lomé en janvier 2020. Les états membres, maîtres d’ouvrage, l’ont missionnée pour assurer la coordination technique de l’Initiative de Lomé. À ce titre elle est aussi maître d’œuvre.


La Fondation opère sur trois axes :
1. La plateformisation de l’IDL, en favorisant la coopération de toutes
les parties prenantes de la lutte contre les MFQI sur le continent africain.
2. Le plaidoyer, en contribuant à la sensibilisation au niveau international.
3. L’appui technique, en travaillant auprès des ministres de la Santé
des pays membres et candidats de l’Initiative de Lomé.


Après avoir commissionné un audit législatif et une étude sur la chaîne d’approvisionnement pharmaceutique en 2020 et 2021, elle a élaboré, en 2022, une proposition méthodologique pour adresser la question de la lutte contre le trafic de MFQI de manière systémique.

Le 23 août 2022, lors de la 72e session du Comité régional de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) pour l’Afrique, la Fondation Brazzaville a coorganisé un événement parallèle avec le Ministère de la Santé de la République du Togo et le Bureau régional de l’Afrique de l’OMS. Sur la photo, Dr Mamessilé Aklah Agba-Assih, Ministre déléguée de la Santé, de l’Hygiène publique et de l’Accès universel aux soins du Togo ; Dr Joseph Kaboré, Directeur de la gestion des programmes de l’OMS pour l’Afrique ; Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur Général de l’OMS ; Mme Minata Samaté Cessouma, Commissaire à la santé, aux affaires humanitaires et au développement social à l’Union africaine ; Dr Daniel Ngamije, Ministre de la Santé du Rwanda ; M. Richard Amalvy, Directeur général de la Fondation Brazzaville.

Cadre partenarial

États signataires

Les États signataires sont les maîtres d’ouvrage du programme. Hôte du sommet de lancement, la République du Togo assure la coordination politique.

République

du Congo

République

du Ghana

République

du Niger

République

du Sénégal

République

du Togo

République

d’Ouganda

États candidats

République

de Gambie

République

de Guinée Bissau

République

démocratique

du Congo

Coordination technique

La Fondation Brazzaville est maître d’œuvre du programme et elle assure à ce titre la coordination technique.

Alliances stratégiques

La Fondation jouit du statut d’observateur au comité des parties de la Convention MEDICRIME du Conseil de l’Europe depuis mai 2021. Elle est membre du comité exécutif de l’Alliance Fight the Fakes depuis mars 2022.

Coopération et collaboration

Les partenaires de l’Initiative de Lomé entretiennent des relations de travail avec :

Perspectives

– Mise en place de séminaires techniques en relation avec les pays signataires et les organisations intergouvernementales partenaires.

– Mise en place de plans nationaux de lutte contre les MFQI autour de quatre domaines d’action : état de droit, sécurité, santé publique, économie de la santé
– Suivi de la signature et de la ratification des accords internationaux
– Amélioration du cadre législatif des états signataires
– Renforcer les capacités sur la chaîne d’approvisionnement pharmaceutique et améliorer la souveraineté des pays africains en matière de produits pharmaceutiques
– Mise en place d’une consultation internationale de jeunes experts

Ressources documentaires

23/12/2019
Adiac Congo
Article

L’Afrique au cœur de la lutte mondiale contre les faux médicaments

23/12/2019
La Revue de l’Afrique
Article

Cécilia Attias dénonce les méfaits des médicaments falsifiés en Afrique

22/12/2019
Le Parisien
Tribune

Cécilia Attias alerte sur les faux médicaments : « Combien de familles ravagées par ces pratiques inhumaines ? »

20/12/2019
Jeune Afrique
Tribune

L’Afrique se mobilise contre le trafic de faux médicaments

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Sources

Gnassingbe A, Awesso A, Geissbuhler A, Flahault A, Sprumont D. Expansion du marché informel de médicaments au Togo : essai d’analyse du phénomène.
Revue internationale de Criminologie et de Police technique et scientifique 2017 ; LXX N°3: 259-275.

Autre action en faveur de la santé publique